Votre produit et son brevet, sa protection, son étendue

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Par Natalie Gauthier, Faculté de droit, Université d’Ottawa (2006)

Un brevet, en vertu de l’Office de la propriété intellectuelle (OPIC) est un document aux termes duquel un gouvernement accorde à un inventeur le droit d’empêcher d’autre personne de fabriquer, d’employer ou de vendre son produit dans un pays concerné.

Le brevet vise les nouvelles inventions (procédé, machine, fabrication, composition de matériaux), ou toute amélioration nouvelle et utile d’une invention existante. Les droits conférés par un brevet canadien s’appliquent à l’ensemble du Canada mais non aux pays étrangers pour lesquels il faut obtenir des droits distincts. De plus, une invention n’est pas protégée au Canada par un brevet étranger. Qu’en est-il alors des produits traversant nos frontières ?

Produit étranger demandant la protection au Canada

Un demandeur non-résident qui demande un brevet et qui ne semble pas résider ou faire des opérations à un adresse spécifiée au Canada, désigne à la date du dépôt de sa demande, un personne ou une maison d’affaires résidant ou faisant des opérations à une adresse spécifiée au Canada afin de le représenter.

Demande de brevets à l’étranger

Sachez qu’un brevet obtenu au Canada ne protège pas une invention dans un autre pays. Les droits attachés aux brevets se limitent au territoire pour lequel ils ont été accordés. Pour obtenir une telle protection, il faut déposer une demande dans chacun de ces pays.

Vous pouvez faire une demande de brevets étrangers au Canada même, par l’entremise du Bureau des brevets en vertu du Traité de coopération en matière de brevets, ou encore en vous adressant directement au bureau des brevets du pays en question.

Notons également que plusieurs pays, dont le Canada, ont signé la Convention de Paris pour la protection de la propriété intellectuelle. Ce traité vous permet d’invoquer ce qu’on appelle la « priorité conventionnelle ». Cela signifie qu’une demande de brevets déposée dans l’un des pays signataires porte la même date de dépôt dans tous les autres, à la seule condition que le titulaire fasse dans ces autres pays une demande dans les 12 mois suivant le dépôt initial.

Quelle que soit la façon dont vous procédez, il faut vous conformer aux lois sur les brevets de ce pays, lesquelles peuvent différer de la loi canadienne. Notons que le fait de fabriquer, de vendre ou de se servir d’ un produit ou d’ un procédé breveté au Canada dans un autre pays ne constitue pas en soi une violation du brevet canadien. Il faut être titulaire d’un brevet étranger pour poursuivre les contrevenants à l’étranger. La situation est toutefois plus complexe lorsque des infractions sont commises à l’intérieur et à l’ extérieur du territoire que couvre le brevet, comme en font foi certains arrêts.

Jurisprudence antérieure

En effet, la Cour de circuit fédérale des États-Unis a jugé en décembre 2004 que le fabricant du BlackBerry, Research-In-Motion (RIM), était coupable de violation directe d’ un brevet aux États-Unis, même si certains des faits essentiels à la poursuite du demandeur, NTP, Inc. (NTP), ont eu lieu au Canada. Dans cette poursuite, RIM a affirmé que la violation du brevet de NTP n’ est pas survenue « aux États-Unis », contrairement aux exigences de la loi, en se fondant sur le fait que le relais dont elle s’ est servi pour transmettre les courriels aux utilisateurs de BlackBerry se trouvait au Canada.

Le tribunal en a jugé différemment et a invoqué une disposition de la loi américaine sur les brevets dont l’ effet est extraterritorial. Le tribunal a statué qu’ il y avait violation directe des brevets de NTP même si le relais de RIM ne se trouvait pas aux États-Unis puisque le système de RIM avait servi à l’ avantage de clients américains. RIM a prétendu que la décision était non fondée en droit puisqu’ il n’ y avait pas violation directe aux États-Unis et elle a présenté une requête pour une nouvelle audience.

La jurisprudence abonde dans le même sens et démontre la tendance à élargir l’application des lois sur les brevets aux activités internationales.

Par conséquent, les entreprises canadiennes qui opèrent à l’étranger doivent s’assurer qu’elles ne violent pas de brevets étrangers, même si leurs activités n’ont qu’un lien indirect avec le territoire en question. Les entreprises canadiennes pourraient être capables d’obtenir des brevets étrangers et de s’en servir pour limiter les activités internationales de leurs concurrents, moyennant redevances.

Note de l’auteur: L’information contenue dans cette chronique est générale et ne constitue pas un avis juridique.

Tous droits réservés, La pub et le droit © Natalie Gauthier, 2006

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